Le système bancaire haïtien est souvent pointé du doigt pour son manque de transparence et sa gestion controversée des devises étrangères, en particulier du dollar américain. Dans un pays où une grande partie de l’économie est dollarisée, les clients se retrouvent fréquemment face à un dilemme frustrant : bien qu’ils déposent des dollars sur leurs comptes, ces devises ne sont pas toujours disponibles lors des retraits. Cette situation crée des tensions à plusieurs niveaux et soulève des questions sur la gestion interne des banques, les directives économiques nationales, et le rôle souvent invisible des autorités bancaires.
Le système bancaire en Haïti ressemble à une comédie absurde, où l’on dépose des dollars sans jamais pouvoir les retirer. Les banques semblent jouer à un jeu de cache-cache avec leurs propres clients, tout en pointant du doigt un système opaque qu’elles ne contrôlent soi-disant pas. Que ce soit dans le cadre d’une économie fortement dollarisée, où le dollar est essentiel, les clients se retrouvent prisonniers de la bureaucratie bancaire. Et pourtant, leurs dollars, ils les ont déposés. Où sont-ils passés ? Mystère.
N.E. , une cliente comme beaucoup d’autres, ne sait plus quoi faire. Déposer son argent est devenu une source d’angoisse, car au moment de retirer, la réponse est toujours la même : « Pas de dollars aujourd’hui, désolé. » D’autres, comme M.E, manifestent leur mécontentement de manière verbale à l’intérieur de la banque. Malgré cette colère, certains reconnaissent que les caissiers ne sont pas directement responsables de la situation, comme l’explique une victime :
Mwen fini pa rann mwen kont ke se jis travay yo ba yo fè an yap fè.
La frustration monte, l’insécurité financière grandit, et le client commence à réfléchir à des solutions alternatives. Il planifie comment protéger ses économies d’un système bancaire qui ne tient plus ses promesses. Et les caissiers, eux, sont au milieu de cette tempête. Ils recoivent la colère des clients tout en sachant pertinemment qu’ils ne font que suivre des ordres.
J.J, un caissier, admet à demi-mot son malaise à devoir annoncer aux clients qu’ils ne pourront pas récupérer leur argent. Il sait ce que cela implique. La tension est palpable à chaque interaction. Pour S.D., une autre caissière, rester calme est devenu un exercice quotidien. Les caissiers ne sont pas responsables, ils ne sont que des exécutants dans un théâtre dirigé par une entité invisible. Qui tire les ficelles ? Les autorités bancaires ? Le gouvernement ? Les spéculateurs ? Une chose est sûre, personne n’est prêt à dévoiler cette vérité amère.
Les caisses des banques haïtiennes sont fermées à double tour, pas à cause d’un manque de dollars, mais à cause d’un système où la gestion des devises étrangères est aussi mystérieuse que suspecte. Pendant que le client se bat pour récupérer son dû, le système bancaire continue de fonctionner dans une opacité totale. Ce jeu, où chacun est à la fois perdant et victime, laisse un goût amer, un sentiment d’abandon, où les vérités qui dérangent sont murmurées tout bas, loin des guichets. Ce silence complice doit cesser, car un client qui ne peut retirer son argent est un client trahi (Revandika Media). Les banques d’Haïti doivent des réponses, et rapidement.
Stacy L. JEAN
Redactrice en Chef